Championnat du Monde sur route Elite à Vérone, le 3 octobre 2004.
A défaut de candidat au titre, l’équipe de France Elite dirigée par Frédéric Moncassin avait choisi de donner priorité à la jeunesse sur les routes de Vérone. Le Mevel, longtemps échappé, et Calzati, en relayeur, ont permis aux tricolores d’exister… et de prendre des marques pour l’avenir.
Le visage noir de poussière, Eric Leblacher n’en peut plus. Il cherche son sac et va s’asseoir sur une chaise longue installée au pied du camping-car de l’équipe de France. Le dernier Bleu sélectionné par Frédéric Moncassin a été à la hauteur de la situation. Ses gestes se font au ralenti mais son débit de paroles, après un rallye long de 265 bornes; exige de tendre l’oreille. « Christophe (Le MeveL NDLR) a dégainé au bout de trois bornes de course, souffle-t-il. Après c’est Sylvain (Calzati) qui a pris le relais, et quand ça a vissé, on s’est tous accrochés. Moi, je remontais Jérôme (Pineau) et David (Moncoutié). Je me suis attaché à bien le faire. J’étais le douzième homme de cette équipe mais j’ai prouvé que j’avais ma place… même si je n’ai été sélectionné que six jours avant le départ de la course. Je suis content que Frédéric Moncassin ait parié sur les jeunes. En retour, Le Mevel, Calzati, Pineau et moi, on a su répondre présent. On a démontré qu’il ne s’était pas trompé et que nous sommes peut-être l’équipe de demain. »
Leblacher à fait le boulot.
Là où certains craignaient une équipe timorée, perdue face aux ténors internationaux, aux gros moteurs des classiques, on a vu un groupe offensif qui se poussa du col à chaque fois qu’il le put. « On a vu du maillot tricolore sur cette épreuve, se réjouit Laurent Brochard qui faisait figure d’ancien au milieu des jeunots. Les autres formations ont pu voir que l’équipe de France est toujours là et que sur certaines situations elle peut parfois encore jouer les trouble-fête. On a bien joué avec les moyens qui étaient les nôtres cette année. Chacun a donné le maximum de ses possibilités. Maintenant, il reste aux jeunes à s’aguerrir en vue de l’avenir. »
Un cran au-dessus
Pour cela, nos coureurs doivent évoluer au plus haut niveau, disputer les plus grandes courses du calendrier. Le ProTour devrait y contribuer pour ceux qui appartiennent aux équipes admises au sein de cette ligue très exclusive. Pour les autres, cela risque au contraire de constituer’un frein supplémentaire. Exemple Sylvain Calzati de RAGT semences-MG Rover: « J’étais bien, mais passé un certain seuil de bornes, les jambes ne suivaient plus, constate-t-il. Actuellement, j’ai le niveau « Coupe de France » et après 210 bornes c’est dur. »
Calzati a répondu présent.
Ce le fut aussi pour Jérôme Pineau, classé premier Tricolore à Vérone. « Un Mondial, c’est vraiment un cran au- dessus, analyse-t-il. Nous on coince,à la fin de parcours, les autres pas. Mais on est jeune et avec le temps… La satisfaction c’est que l’équipe a longtemps été de l’avant. En plus, on s’entend tous bien. Nous avons vite trouvé des automatismes alors que nous courons à l’année pour des groupes sportifs différents. On est au début de l’histoire d’un groupe. Dans cinq ans, cette équipe-là, peut-être qu’elle fera mal. »
Jérôme Pineau, un mental pour assumer des responsabilités.
Ce groupe de copains veut aller loin… sans renoncer à ses valeurs. Pour preuve, il suffisait de voir les mines de chacun après la course, quand le DTN Patrick Cluzaud et le médecin Armand Mégret leur annoncèrent le décès du père de Sandy Casar, foudroyé par une crise cardiaque la nuit précédant le Mondial. « Je n’arrive pas à y croire, déclare Nicolas Vogondy. Je connaissais bien le papa de Sandy. Le Championnat du Monde à la place de ce qui arrive à notre pote, c’est zéro. Le vélo à côté d’une nouvelle aussi terrible que celle-là, c’est rien. » En plus des qualités affichées en course, cette équipe a visiblement beaucoup de cœur…
Hervé Bombrun
(2004-10-03)