Le coureur de la Française des Jeux, un temps sans équipe cet hiver, s’est imposé de belle manière, hier.
IL EN A EU LA LARME A L’ŒIL. Hier, Eric Leblacher a remporté la troisième étape de l’étoile de Bessèges, tout seul, comme un grand. Il a fait la différence au terme d’une étape mouvementée, où les pièges étaient nombreux. La satisfaction était personnelle puisqu’elle ne mettait pas en péril le maillot de leader de Frederik Willems.
Hier, le Normand s’est au fond offert un petit plaisir à la gloire de La Française des Jeux, l’équipe qui lui a fait confiance l’hiver dernier alors que le Crédit Agricole ne souhaitait pas renouveler un contrat arrivé à son terme. « Je n’ai aucun mépris contre le Crédit Agricole ou Roger Legeay, expliquait Leblacher. Il a réagi en patron d’équipe et je n’avais pas obtenu de résultats. Il était logique qu’il ait moins confiance en moi. » Leblacher est un gentil garçon, mais il ne méritait certainement pas qu’on l’abandonne après ses blessures (deux clavicules cassées). « J’aurais voulu un peu plus de patience. J’ai toujours eu un tempérament d’attaquant. Je savais que j’étais capable de faire quelque chose de bien. »
Sur le dernier Tour d’Espagne, il est allé au charbon tous les jours, au point de presque devenir le héros français de la Vuelta, la première semaine. « Mais je me suis cassé la clavicule lors de la 12ème étape et, à partir de là, tout a changé. J’avais déjà eu ce pépin lors de Paris-Camembert, mais je ne pensais pas qu’on me condamnerait comme ça. » Leblacher est aussi un gars simple qui raconte sobrement comment Marc Madiot lui a tendu la main. « Un jour, il m’a appelé pour me demander ce que je devenais. J’ai dit que j’étais au chômage. C’était un vendredi, et il m’a dit de passer le lundi pour signer à La Française des Jeux. » Il n’oublie pas non plus les siens, à l’heure de la victoire, et notamment son épouse: « Elle a vécu aussi des moments difficiles. La motivation est un tout et je ne l’aurais jamais eu sans elle et sans mon enfant. »
Hier, elle lui a sûrement permis de forcer l’allure, alors qu’il appartenait à un groupe de tête où se trouvait Sylvain Chavanel, le seul à même de provoquer un bouleversement au classement général. « Je reprends et je me sens de mieux en mieux, expliquait ce dernier à l’arrivée. Bien sûr que j’aurais voulu faire la différence aujourd’hui, mais je ne suis pas tout seul dans le peloton.» Le coureur de Cofidis ne gagnera sans doute pas l’étoile de
Bessèges, pas plus que Sébastien Joly, autre transfuge de La Française des Jeux, deuxième hier, qui a donné un peu plus d’ampleur à la victoire de Leblacher et salué la présence de Français méritants. « L’esprit de groupe fonctionne parfaitement, expliquait Joly. On prend ce qui est à prendre. »
Et Frederik Willens, lui, a parfaitement conscience de ce qu’il devrait bientôt conquérir, rien de moins que le succès final. « On a géré, assurait hier le Belgede Chocolat Jacques. Rien n’est acquis, mais je sais que l’équipe fait son maximum pour aller jusqu’au bout. Les deux derniers jours vont être difficiles, mais je tiens, pour l’heure, la plus grosse victoire de ma carrière. »
Manuel Martinez
L’Equipe (2006-02-04)